Pour un Afghanistan connecté : Une entrevue avec le directeur général de Roshan

Karim Khoja5 novembre 2015 – Cette semaine, la Fondation s’est assise avec le directeur général du principal fournisseur de services de télécommunications de l’Afghanistan, Roshan, afin de discuter de l’importance de relier les collectivités en Afghanistan. Karim Khoja, qui est en outre un fier Canadien, compte plus de 25 ans d’expérience dans l’industrie des télécommunications dans cinq pays (Afghanistan, Croatie, Pakistan, Pologne et Tadjikistan). En octobre 2015, il a été nommé cadre de l’année à l’occasion de la 12e édition des Prix annuels de commerce international, à Toronto.

Pour plus d’une décennie, M. Khoja a consacré son temps au Fonds Aga Khan pour le développement économique (AKFED) en vue de favoriser la concurrence et les pratiques exemplaires dans l’industrie des télécommunications en Afghanistan et au Tadjikistan. Il s’est concentré non seulement sur les résultats financiers, mais également sur la façon dont la technologie peut être utilisée pour changer des vies.

Cinq questions pour Karim Khoja

1. Roshan a été établie en Afghanistan en 2003 à une époque où le pays était fragile. En rétrospective, comment saviez-vous que les télécommunications pourraient jouer un rôle aussi puissant et transformateur dans ce pays?

C’était une question d’offre et de demande. Les Afghans voulaient être reliés les uns aux autres et au reste du monde, mais en 2003, seules 50 000 personnes avaient accès à un téléphone, et les gens devaient se rendre à pied dans un pays voisin pour faire des appels. Trente ans de guerre avaient détruit l’infrastructure, alimenté la corruption, généré des risques de sécurité chroniques et laissé la plus grande partie de la population dans un état de pauvreté abjecte. Malgré ces obstacles, nous savions que si les Afghans pouvaient communiquer entre eux, alors ils ne se battraient pas.

Sous la tutelle de l’AKFED, nous sommes entrés en Afghanistan en croyant que nous pouvions mettre à profit la capacité des technologies mobiles de favoriser la reconstruction et le développement économique. Le potentiel humain du pays pouvait être utilisé d’une façon constructive. Les chiffres ont montré que nous avions raison – près de 90 % des Afghans ont maintenant accès à un téléphone. Le secteur des télécommunications a investi quelque 2,5 milliards de dollars en Afghanistan et a développé des produits et services qui relient l’éducation, les soins de santé, le secteur de l’entreprise et la technologie afin d’aider les jeunes afghans à devenir les leaders de demain.

2. Comment Roshan a-t-il réussi à s’établir dans un contexte de si grande insécurité en Afghanistan?

En fait, la situation sur le plan de la sécurité était plus gérable à l’époque de la création de Roshan qu’aujourd’hui. Comme nous offrions un service essentiel qui aidait à transformer la vie de tous les Afghans, tous horizons confondus, les risques de sécurité ne nous touchaient pas vraiment. Malheureusement, la situation est bien plus volatile aujourd’hui, et les incidents de violence se sont faits plus nombreux depuis le départ des forces internationales. Cependant, nous croyons que la sécurité et le développement social et économique vont de pair. Roshan et d’autres organismes du secteur privé ont beaucoup investi dans l’infrastructure de l’Afghanistan en vue de renforcer la sécurité dans ce pays, et nous continuerons dans cette voie.

3. La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est au cœur de votre travail en Afghanistan. De quelle initiative de RSE êtes-vous le plus fier, et pourquoi?

Je suis particulièrement fier de l’initiative de télémédecine de Roshan, qui a comblé une lacune énorme dans l’infrastructure de santé décimée et qui s’aligne si bien avec notre modèle d’entreprise, à savoir créer des liens entre les contributions sociales et la réussite commerciale en vue d’alimenter le développement socioéconomique dans les secteurs clés et la société civile en Afghanistan. La télémédecine utilise la technologie mobile pour relier les hôpitaux ruraux du pays avec des centres médicaux d’excellence, comme l’Hôpital universitaire Aga Khan, situé à Karachi, au Pakistan. Cette technologie a permis aux médecins afghans basés dans des régions reculées du pays de poser des diagnostics et d’effectuer des chirurgies. Au cours des huit dernières années, plus de 14 000 patients partout en Afghanistan ont reçu des traitements et des diagnostics grâce à ce service, et plus de 4 000 fournisseurs de soins ont reçu des formations.

4. Diriger la plus importante entreprise de télécommunications en Afghanistan n’est pas une mince affaire. Qu’est-ce qui vous inspire à continuer tous les jours?

Il y a plusieurs choses. Tout d’abord, il y a Son Altesse l’Aga Khan, qui croit qu’il y a toujours moyen d’en faire plus. Puis il y a l’équipe extrêmement talentueuse qui m’entoure.

5. Roshan compte maintenant plus de six millions d’abonnés et a fait plusieurs investissements en santé, en éducation et en égalité entre femmes et hommes. Quelle est la prochaine étape pour Roshan en Afghanistan?

Nous voulons construire notre propre réseau de fibres optiques afin de faire exploser l’accès à Internet haute vitesse en Afghanistan. La libéralisation du marché de la fibre optique est essentielle à la création d’une nouvelle vague de croissance dans le domaine des télécommunications, afin de complémenter les progrès des dix dernières années. La technologie de fibre optique de Roshan ouvrirait tout un monde de nouvelles applications et de services pour les Afghans, et entraînerait au pays une transformation aussi profonde qu’en 2003, lorsque nous avons introduit les services de téléphonie.

 

Ressources :

< Retour aux listes d'actualités