Façonner des citoyens du monde : une entrevue avec Katherine Stauch (Conseil scolaire du district Ottawa-Carleton)

18 janvier 2017– Des boules de papier chiffonné et une poubelle : dans certaines salles de classe, cela suffit à déclencher une discussion enjouée au sujet du développement mondial. Ces accessoires font partie d’une activité de classe proposée par le Guide d’enseignement aux citoyens du monde, une nouvelle ressource pédagogique créée par la Fondation Aga Khan Canada (la Fondation). Katherine Stauch, chef du Département d’études canadiennes et mondiales à l’École secondaire Brookfield, à Ottawa, utilise le Guide dans sa salle de classe, et nous avons discuté un peu avec elle au sujet de l’éducation en citoyenneté mondiale, de l’apprentissage centré sur les élèves et de cette nouvelle ressource pour enseignants.

Parlez-moi de vous.

J’enseigne à l’École secondaire Brookfield, à Ottawa, où je suis la chef du Département d’études canadiennes et mondiales. Ce rôle me convient parfaitement puisque j’ai eu la chance de grandir avec un amour pour d’autres régions du monde et un point de vue mondial. Lorsque j’avais huit ans, mes parents ont déménagé notre famille en France pour un an, la durée de leur année sabbatique. Ce fut une expérience incroyable, qui a déclenché en moi un désir de connaître le monde le plus possible. Depuis, j’ai habité dans cinq différents pays et j’en ai visité 55. J’ai même été hôtesse de l’air pendant un certain temps. Ces expériences ont joué un rôle important dans mon développement en tant que personne, enseignante et citoyenne du monde.

Dans quels pays avez-vous habité?

J’ai habité en Espagne, en France, en Allemagne, aux Émirats arabes unis et au Canada.

Incroyable! À votre avis, comment un enseignant ou un étudiant qui n’a pas vécu ce genre d’expérience peut-il développer une compréhension ou une sensibilisation envers d’autres régions de la planète?

Faites tout ce que vous pouvez pour apprendre d’autrui et pour partager vos expériences. Chaque fois que vous allez quelque part ou que vous rencontrez quelqu’un, vous avez une occasion d’apprendre quelque chose. Je répète cela à mes élèves sans arrêt. La citoyenneté mondiale ne signifie pas que vous devez quitter le Canada ou même votre ville. Il s’agit plutôt de comprendre et d’apprécier les contextes uniques d’autres habitants de la planète – qui sont-ils, quelles sont leurs croyances, comment vivent-ils, à quels enjeux sont-ils confrontés, qu’est-ce qui les fait vibrer? Voilà ce qui fait de nous des citoyens du monde. Il ne s’agit pas tant d’un mouvement physique que d’une volonté de comprendre. Les concepts de « localité » et de « mondialité » sont très reliés.

Selon vous, les élèves ont-ils une idée juste du concept de citoyenneté mondiale?

Certains plus que d’autres. Une de mes expériences préférées cette année s’est produite lorsque je supervisais la cafétéria à l’heure du dîner. La conversation avait lieu en espagnol à une table, en coréen à une autre, en arabe à une autre, et ainsi de suite. Mais il y avait une table où quatre élèves de quatre pays différents mangeaient ensemble. L’anglais était leur seule langue commune. Ils parlaient du sens de différents mots dans leurs langues maternelles respectives, et faisaient des comparaisons en cherchant des points communs. C’était beau à voir.

Comment facilitez-vous la citoyenneté mondiale dans votre salle de classe?

J’aime donner à mes élèves suffisamment d’espace pour leur permettre de puiser dans leurs propres expériences et de partager les leçons qu’ils ont apprises. J’enseigne l’engagement citoyen en ce moment, et nous examinons différents modèles de gouvernement, ainsi que les droits et responsabilités des élèves en tant que citoyens d’un pays particulier et du monde dans sa totalité. Une de mes élèves de Libye a partagé son histoire avec le groupe et a parlé d’enjeux liés à l’immigration. Son père est encore en Libye alors que le reste de sa famille est ici au Canada. La mère d’une autre élève était à Tiananmen Square dans les années 70, et elle a apporté son livre du président Mao et a partagé quelques bribes de son histoire. Pour les élèves, c’était une excellente occasion d’explorer certains des concepts du programme à travers une expérience directe. Les élèves ont un riche bagage d’expérience et, en tant qu’enseignante, mon travail consiste à leur fournir des occasions de partager ces expériences et d’apprendre les uns des autres.

La Fondation vient de publier son Guide d’enseignement aux citoyens du monde. Comment utilisez-vous cette ressource pour appuyer l’éducation en citoyenneté mondiale dans votre salle de classe?

La ressource est un excellent outil pour susciter la discussion! Voici une de mes activités préférées : les élèves devaient lancer des boules de papier chiffonné de différents endroits dans la salle. Le point consistait à montrer que l’inégalité est souvent systémique et que nous n’avons pas tous accès aux mêmes opportunités, ressources et services. Il y a souvent des obstacles. Évidemment, les élèves les plus près du bac n’avaient aucune difficulté à viser juste, mais ceux qui étaient de l’autre côté de la salle se plaignaient de leur position désavantageuse. Nous avons eu une excellente discussion après l’activité au sujet des inégalités à l’échelle locale et internationale. Les élèves étaient très engagés, et je voyais des ampoules s’allumer dans leurs têtes.

Que diriez-vous aux enseignants qui veulent intégrer la citoyenneté mondiale dans leurs cours, mais qui ne savent pas par où commencer?

Bien que la citoyenneté mondiale fasse l’objet de nombreuses discussions depuis un certain temps, la mise en pratique du concept n’en est qu’à ses débuts. Il s’agit donc d’une époque très excitante, parce qu’il y a de nombreuses occasions d’explorer de nouveaux territoires.
Une des grandes questions consiste à intégrer la citoyenneté mondiale dans les programmes scolaires. Il est tentant de traiter le concept comme un simple rajout au programme. Mais mon approche est très différente. Je me demande ce que je veux accomplir par le biais du programme. Je vise l’inclusion et l’intégration.

S’il s’agit de votre première expérience, je vous conseille de commencer petit. Commencez par une leçon. Lorsque vous aurez compris l’idée, essayez de faire une unité au complet et d’élargir petit à petit. Notre personnel et nos élèves ont beaucoup de savoir-faire, ce qui vous facilitera la tâche, puisque vous n’avez pas besoin de tout savoir. Laissez les élèves diriger leur propre apprentissage.
Dans cette optique, le Guide d’enseignement aux citoyens du monde est un excellent outil. Il est incroyablement facile à utiliser, et tout est clairement affiché en un seul endroit : plans de cours, vidéos, leçons d’approfondissement, devoirs et liens vers des ressources additionnelles. Chaque leçon comporte plusieurs options, ce qui vous permet d’explorer les thèmes qui intéressent particulièrement vos élèves. Le guide invite réellement la discussion et la pensée critique au sujet d’enjeux et de concepts clés.

Merci!

Le Guide d’enseignement aux citoyens du monde est une ressource pédagogique interactive et divertissante conçue pour aider vos élèves à comprendre leur rôle en tant que citoyens mondiaux. Le guide est conçu pour des classes de niveaux intermédiaire et secondaire et comprend des activités engageantes, des guides de discussion, des devoirs, des fiches d’information, des vidéos, des exemples de la vie réelle, et bien plus encore! Visitez /fr/guide pour obtenir votre exemplaire gratuit.
La Fondation Aga Khan Canada est un organisme de bienfaisance sans but lucratif enregistré au Canada qui œuvre dans le domaine du développement international. Elle travaille en Asie et en Afrique dans le but de trouver des solutions durables aux problèmes complexes qui sous-tendent la pauvreté dans le monde.

Cette entrevue a été modifiée et condensée.

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